Rachelle, à quel âge as-tu découvert le blues et de quelle manière t’es-tu immiscée dans le monde de l’harmonica ?
J’ai commencé à jouer de cet instrument, après avoir été initiée à la flûte à bec, vers l’âge de 5 ans.
C’est un soir de Noël que j’ai trouvé un harmonica au pied du sapin, il était accompagné d’une méthode d’apprentissage signée Jean-Jacques Milteau. Il s’agissait d’une sélection de petits blues, de morceaux de gospel tels que «When The Saints Go Marching In» et même de comptines comme «Au Clair De La Lune» etc…
Cela ma donné l’envie de continuer et de découvrir les autres ouvrages de Jean-Jacques Milteau qui étaient conseillés en 4ème de couverture de celui que l’on m’avait offert.
Quelques années plus tard j’ai intégré l’Ecole Du Souffle Du Blues à L’Utopia…

Pourquoi l’harmonica, y avait-il déjà des gens qui jouaient de cet instrument au sein de ta famille ?
Non pas du tout, ma mère m’a initiée à la musique car c’est un art qu’elle aime par-dessus tout. Je suis la seule musicienne de la famille…

Tu es une judokate de haut niveau (championne de France chez les juniors, vice-championne de France en 1ère division etc…) et je pense que tu dois poursuivre tes études (Rachelle est déjà titulaire d’un BAC S). Comment arrives-tu à concilier toutes ces activités ?
C’est beaucoup d’organisation (rires).
En fait, dès que j’en ai le temps, je m’entraîne en semaine… mais cela ne n’empêche pas de jouer tous les jours et de continuer mes études en Fac !

Je crois que tu es provinciale, cela devait ajouter une difficulté supplémentaire concernant tes déplacements vers L’Utopia afin d’y prendre tes leçons d’harmonica…
J’habite en Normandie mais à un endroit situé à la frontière avec les Yvelines. C’est à une heure de Paris, donc ça ne pose aucun problème.

Peux-tu revenir sur tes professeurs d’alors ?
Le Président d’Honneur de l’école d’harmonica est Jean-Jacques Milteau. Le professeur qui m’a appris la technique et plein d’autres choses est Greg Zlap.
J’ai pris des cours là-bas pendant 6 ans…
Il s’agit de stages trimestriels avec, à chaque fois, un concert final au bout de 3 mois.

Quels sont tes rapports avec Greg, vous avez probablement beaucoup joué ensemble ?
Greg est un ami !
C’est quelqu’un qui m’a beaucoup appris, aussi bien dans la technique instrumentale pure et dure que dans l’approche musicale, de l’improvisation et du live.
Il a également su me conseiller à certaines périodes de mon parcours. Nous nous entendons très bien et c’est toujours un plaisir de participer à des jams en sa compagnie.

A partir de quand as-tu senti que tu pouvais faire de cette passion une activité «quasi» principale, puisque c’est en bonne voie pour le devenir ?
J’espère (rires) !
Dès que j’ai eu mon Bac, l’année dernière, je me suis beaucoup plus investie dans la musique car j’en ai eu davantage le temps. Cela m’a permis de commencer à travailler intensément sur mes compositions et à monter quelque chose de sérieux.

Les femmes harmonicistes sont plutôt minoritaires, surtout en France. Comment expliques-tu cela ?
C’est une bonne question (rires) !
Il y a, quand même, quelques filles qui jouent de l’harmonica. Elles sont très rares en France mais en Belgique j’ai des amies, comme Geneviève Dartevelle….
Cette dernière se montre, aussi, très à l’aise dans le jazz interprété à l’harmonica chromatique.
Je connais d’autres femmes harmonicistes en Belgique et même en Pologne !
Je pense que l’harmonica féminin est en plein devenir, c’est un instrument qui a vraiment le vent en poupe.

Quels sont tes harmonicistes de prédilection ?
C’est une question difficile car il y en a beaucoup (rires) !
J’adore Stevie Wonder, Junior Wells, Little Walter et bien sûr Jean-Jacques Milteau ainsi que Greg Zlap. Je ne peux pas oublier de citer ces deux derniers !

Et parmi les femmes ?
(Hésitation)…. Comme qui par exemple (rires) ?

Quelqu’un comme Annie Raines par exemple…
Oui, effectivement, je l’ai découverte il y a peu de temps en «tombant» sur son site.
Je suis une grande admiratrice de Sister Rosetta Tharpe qui est davantage connue pour être une guitariste. J’adore sa musique… Ce n’est pas une harmoniciste mais c’est une femme qui fait du blues !

Depuis peu, tu tournes avec ton propre groupe. Peux-tu me le présenter ?
A la basse il y a Gilles Sonnois, Xavier Hamon à la batterie et Julien Joubert à la guitare. Ils sont, pour moi, de vrais complices. La configuration du groupe peut être modifiée en fonction des disponibilités de chacun. Je les ai tous rencontrés via des connaissances communes dans le milieu de la musique.

Comment votre répertoire s’articule-t-il actuellement ?
Pour l’instant il y a encore beaucoup de reprises, mais nous tenons à nous les approprier de telle manière à ce que nos interprétations s’éloignent au maximum des versions originales. Nous mettons un point d’honneur à y ajouter notre propre personnalité musicale.
Nos compositions sont encore «secrètes», elles seront dévoilées sur notre futur album.

En quoi es-tu différente de tes collègues harmonicistes et comment définirais-tu ton style ?
J’essaye de garder un côté mélodique et je fais très attention au son. Sur mon disque je ne pourrai pas renier mes grosses influences blues mais je ne pourrai pas, non plus, occulter ma passion pour la soul music puisque je suis une grande admiratrice d’artistes tels que Ray Charles ou James Brown. Dans le futur, cela se ressentira probablement dans ma musique…

Cet été 2010 semble décisif pour ta carrière car, pour la première fois, on te croise sur les Festivals hexagonaux les plus importants (Cahors, Cognac…). Quels sont les premiers enseignements que tu tires de ces expériences ?
Le fait de toujours me faire plaisir sur scène. De plus, ce sont des Festivals où les rencontres humaines sont très importantes. Nous en profitons également afin de bien observer les artistes confirmés, la manière dont-ils construisent leurs shows etc…
Le fait de pouvoir discuter avec eux nous permet d’apprendre énormément de choses et de bien connaître leurs parcours respectifs. C’est très intéressant…

Peux-tu revenir sur les belles rencontres que tu as pu réaliser ces dernières semaines ?
La chanteuse anglaise Connie Lush m’avait entendue lors du tremplin du Festival de blues de Cahors.
Elle est venue me voir afin de me féliciter pour ma victoire dans cette «compétition». Elle m’a, alors, proposée de la rejoindre sur la grande scène le lendemain. Sans réfléchir j’ai accepté de participer à une jam avec elle. Ce sont des choses qui ne se refusent pas et c’est toujours un plaisir (lors du Festival Blues Passions à Cognac, c’est Joe Louis Walker qui a invité Rachelle sur scène) !
Cette femme est très généreuse, cela se ressent sur scène car elle donne beaucoup aux gens. C’est un exemple à suivre !

Au sein de la scène française, quels sont les gens avec lesquels tu aimerais jouer ?
Il y en a tant que j’ai du mal à te répondre (rires) !
Je suis très admirative de Nico Wayne Toussaint et j’aimerais beaucoup le rencontrer !

Quels ont été tes coups de cœur tout au long de ce Festival ?
J’ai adoré Joe Louis Walker, Eli «Paperboy» Reed, The Victory Travelers…

Quels sont tes projets les plus immédiats ?
Nous allons passer au Festival Blues Sur Seine, en première partie de Jesse Dee, le 5 novembre 2010. D’autres dates vont se concrétiser sous peu (trois concerts en Grande-Bretagne se sont, en effet, ajoutés depuis, nda). Une large partie de mon temps sera consacrée à l’écriture de mon premier album qui va bientôt prendre forme. Avec mes musiciens nous travaillons très sérieusement sur ce projet.

As-tu une conclusion à ajouter ?
Merci à toi de m’avoir accordé cette interview, c’est très gentil…
Sinon je trouve que la formule de Michel Rolland (Créateur, Directeur et Programmateur du Cognac Blues Passions, nda) «La musique y unira le ciel et la terre» est très représentative de l’esprit convivial, généreux et chaleureux du blues.
J’en profite pour remercier Michel, ainsi que toute son équipe, de m’avoir permis de me produire ici. Ils sont vraiment adorables, alors à bientôt (rires) !

www.myspace.com/rachelleplas